donc ce ton glacial que vous prenez en parlant d’elle. Pourquoi cette affectation à l’appeler madame Gerdy ?
— Pourquoi ? répondit l’avocat d’une voix sourde, pourquoi !…
Il quitta son fauteuil, fit au hasard quelques pas dans son cabinet, et revenant se placer près du bonhomme, il dit :
— Parce que, monsieur Tabaret, madame Gerdy n’est pas ma mère.
Cette phrase tomba comme un coup de bâton sur la tête du vieux policier. Il fut étourdi.
— Oh ! fit-il de ce ton qu’on prend pour repousser une proposition impossible ! Oh ! songez-vous à ce que vous dites, mon enfant. Est-ce croyable, est-ce vraisemblable ?
— Oui ! c’est invraisemblable, répondit Noël avec une certaine emphase qui lui était habituelle, c’est incroyable, et cependant c’est vrai. C’est-à-dire que depuis trente-trois ans, depuis ma naissance, cette femme joue la plus merveilleuse et la plus indigne des comédies au profit de son fils, car elle a un fils, et à mon détriment à moi.
— Mon ami, voulut commencer le père Tabaret, qui dans le lointain de cette révélation entrevoyait le fantôme de la veuve Lerouge.
Mais Noël ne l’écoutait pas et semblait à peine en état de l’entendre. Ce garçon si froid et si réser-