Page:Gaboriau - Le Crime d’Orcival, 1867.djvu/140

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

expériences de son répertoire, et il jugeait inutile de la pousser plus loin. Il savait désormais ce qu’il avait intérêt à savoir.

Après un moment de silence, M. Lecoq tressaillit comme au sortir d’un songe, et tirant sa montre :

— Mille diables, fit-il, je suis là que je bavarde, et le temps passe.

— Et Guespin est en prison, remarqua le docteur.

— Nous l’en tirerons, monsieur, répondit l’agent de la sûreté, si toutefois il est innocent, car cette fois je tiens mon affaire, mon roman, si vous voulez, et sans la moindre lacune. Il est cependant un fait, d’une importance capitale, que seul je ne puis expliquer.

— Lequel ? interrogea le père Plantat.

— Est-il possible que M. de Trémorel eût un intérêt immense à trouver quelque chose, un acte, une lettre, un papier, un objet quelconque d’un mince volume, caché dans sa propre maison ?

— Oui, répondit le juge de paix, cela est possible.

— C’est que, reprit Lecoq, il me faudrait une certitude.

Le père Plantat réfléchit un instant.

— Eh bien ! donc, reprit-il, je suis sûr, parfaitement sûr que si Mme de Trémorel était morte subitement, le comte aurait démoli la maison pour retrouver certain papier qu’il savait en la possession de sa femme et que j’ai eu, moi, entre les mains.

— Alors, reprit M. Lecoq, voici le drame.

En entrant au Valfeuillu, j’ai été, comme vous, messieurs, frappé de l’affreux désordre de l’appartement. Comme vous, j’ai pensé d’abord que ce désordre était simplement un effet de l’art.

Je me trompais. Un examen plus attentif m’en a convaincu.

L’assassin, c’est vrai, a tout mis en pièces, brisé les meubles, haché les fauteuils, pour faire croire au passage d’une bande de furieux. Mais au milieu de ces actes de vandalisme prémédité, j’ai pu suivre les traces invo-