Page:Gaboriau - Le Crime d’Orcival, 1867.djvu/277

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— Folle, lui disait Sauvresy, chère folle, crois-tu donc que cela fait mourir ?

— Non, mais je ne veux pas.

— Laisse donc. Avons-nous été moins heureux parce que le lendemain de mon mariage j’ai fait un testament qui te donne toute ma fortune ? Et, tiens, tu dois en avoir une copie ; si tu étais complaisante, tu irais me la chercher.

Elle devint toute rouge, puis fort pâle. Pourquoi demandait-il cette copie ? Voulait-il la déchirer ? Une rapide réflexion la rassura. On ne déchire pas une pièce que d’un mot sur une autre feuille de papier on peut anéantir.

Cependant, elle se défendit un peu.

— J’ignore où est cette copie.

— Je le sais, moi. Elle est dans le tiroir à gauche de l’armoire à glace : Va, tu me feras bien plaisir.

Et pendant qu’elle était sortie :

— Pauvre femme, dit Sauvresy à Hector, pauvre Berthe adorée, si je mourais, elle ne me survivrait pas.

Trémorel ne trouvait rien à répondre, son anxiété était inexprimable et visible.

— Et cet homme là se douterait de quelque chose ! pensait-il, non, ce n’est pas possible.

Berthe rentrait.

— J’ai trouvé, disait-elle.

— Donne.

Il prit cette copie de son testament, et la lut avec une satisfaction évidente, hochant la tête à certains passages où il rappelait son amour pour sa femme.

Quand il eut fini sa lecture :

— Maintenant, demanda-t-il, donnez-moi une plume avec de l’encre.

Hector et Berthe lui firent remarquer qu’écrire allait le fatiguer, mais il fallut le contenter.

Placés au pied du lit, hors de la vue de Sauvresy, les deux coupables échangeaient les regards les plus inquiets. Que pouvait-il écrire ainsi ? Mais il venait de terminer.