Page:Gaboriau - Le Crime d’Orcival, 1867.djvu/375

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papier timbrée à ses armes — un coq chantant avec la devise : toujours vigilant — et rapidement il traçait quelques lignes :

— Tenez, dit-il au père Plantat, voici ce que j’écris à un de mes lieutenants :

« Monsieur Job,

Réunissez à l’instant même six ou huit de nos hommes, et allez à leur tête attendre mes instructions chez le marchand de vin qui fait le coin de la rue des Martyrs et de la rue Lamartine. »

— Pourquoi là-bas, et non ici, chez vous ?

— C’est que nous avons intérêt, cher monsieur, à éviter les courses inutiles. Là-bas, nous sommes à deux pas de chez Mme Charman et tout près de la retraite de Trémorel, car le misérable a loué son appartement dans le quartier de Notre-Dame-de-Lorette.

Le vieux juge de paix eut un geste de surprise.

— Qui vous fait supposer cela ? demanda-t-il.

L’agent de la sûreté sourit, comme si la question lui eût semblé naïve.

— Vous ne vous rappelez donc pas, monsieur, répondit-il, que l’enveloppe de la lettre adressée par Mlle Courtois à sa famille pour annoncer son suicide, portait le timbre de Paris, bureau de la rue Saint-Lazare ? Or, écoutez bien ceci : En quittant la maison de sa tante, Mlle Laurence a dû se rendre directement à l’appartement loué et meublé par Trémorel, dont il lui avait donné l’adresse et où il lui avait promis de la rejoindre le jeudi matin. C’est de cet appartement qu’elle a écrit. Pouvons-nous admettre qu’il lui soit venu à l’idée de faire jeter sa lettre dans un autre quartier que le sien ? C’est d’autant moins probable qu’elle ignore quelles raisons terribles a son amant de craindre des recherches et des poursuites. Hector a-t-il été assez prudent, assez prévoyant pour lui indiquer cette ruse ? Non, car s’il n’était pas un sot, il lui aurait recommandé de déposer cette