Page:Gaboriau - Le Crime d’Orcival, 1867.djvu/381

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vait de l’absinthe, m’a-t-on dit, et même elle n’avait plus rien à se mettre sur le dos. Quand elle recevait de l’argent de son comte, car il lui envoyait encore, elle le dépensait en parties avec des femmes de rien du tout, au lieu de s’acheter de la toilette.

— Et où demeure-t-elle ?

— Tout près d’ici, dans une maison meublée de la rue Vintimile.

— Cela étant, fit sévèrement M. Lecoq, je m’étonne qu’elle ne soit pas ici.

— Ce n’est pas ma faute, allez, cher monsieur, si je sais où est le nid, j’ignore où est l’oiseau. Elle était dénichée, ce matin, lorsque ma première demoiselle est allée chez elle.

— Diable ! mais alors… c’est fort contrariant, il faudrait me la faire chercher bien vite.

— Soyez sans inquiétude. Fancy doit rentrer avant quatre heures et ma première l’attend chez son concierge avec ordre de me l’amener dès qu’elle rentrera, sans même la laisser monter à sa chambre.

— Attendons-la donc.

Il y avait un quart d’heure environ, que M. Lecoq et le père Plantat attendaient, lorsque tout à coup madame Charman, qui a l’oreille très-fine, se dressa.

— Je reconnais, dit-elle, le pas de ma première demoiselle dans l’escalier.

— Écoutez, dit M. Lecoq, puisqu’il en est ainsi, arrangez-vous de façon à ce que Fancy croie que c’est vous qui l’avez envoyée chercher ; mon ami et moi aurons l’air de nous trouver ici par le plus grand des hasards. Mme Charman répondit par un geste d’assentiment :

— Compris ! fit-elle.

Déjà elle faisait un pas vers la porte, l’agent de la sûreté la retint par le bras.

— Encore un mot, ajouta-t-il, dès que vous verrez la conversation engagée entre cette fille et moi, ayez donc l’obligeance d’aller surveiller vos ouvrières dans votre atelier. Ce que j’ai à dire ne vous intéressant pas du tout.