Page:Gaboriau - Le Crime d’Orcival, 1867.djvu/397

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ce moment. Songez qu’il doit être en proie à des terreurs sans bornes. Nous savons, nous, qu’on ne retrouvera pas la dénonciation de Sauvresy, mais il l’ignore, lui. Il se dit que peut-être ce manuscrit a été retrouvé, qu’on a eu des soupçons et que déjà sans doute il est recherché, poursuivi, traqué par la police.

M. Lecoq eut un sourire triomphant.

— Je me suis dit tout cela, répondit-il, et bien d’autres choses encore. Ah ! trouver un moyen de débusquer Trémorel n’était pas aisé. Je l’ai cherché longtemps, mais enfin je l’ai trouvé, juste comme nous entrions ici. Dans une heure, le comte de Trémorel sera au faubourg Saint-Germain. Il va m’en coûter un faux c’est vrai, mais vous m’accorderez bien des circonstances atténuantes. D’ailleurs, qui veut la fin, veut les moyens.

Il prit la plume et, sans quitter son cigare, rapidement, il écrivit :

« Monsieur Wilson,

Quatre des billets de mille francs que vous m’avez donnés en paiement sont faux ; je viens de le reconnaître en les remettant à mon banquier. Si avant dix heures vous n’êtes pas chez moi pour vous expliquer à ce sujet, j’aurai le regret de faire parvenir ce soir même une plainte à monsieur le procureur impérial.

rech. »

— Tenez, monsieur, fit M. Lecoq en passant sa lettre au père Plantat, comprenez-vous ?

D’un coup d’œil le vieux juge de paix eut lu, et il ne put retenir une exclamation de joie qui fit retourner tous les garçons.

— Oui, dit-il, oui, en effet, il sera pris au reçu de cette lettre, d’une épouvante qui triomphera de toutes ses terreurs. Il se dira que parmi les billets remis en paiement il a pu s’en glisser de faux sans qu’il s’en soit aperçu, il se dira qu’une plainte déposée au parquet provoquera