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Page:Gaboriau - Le Crime d’Orcival, 1867.djvu/398

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une enquête, qu’il lui faudra prouver qu’il est bien M. Wilson et qu’alors il est perdu.

— Ainsi vous croyez qu’il sortira ?

— J’en suis sûr, à moins qu’il ne soit devenu fou.

— Nous réussirons donc, je vous le répète, car je viens de surmonter le seul obstacle sérieux.

Il s’interrompit brusquement. La porte du restaurant s’était entr’ouverte et par l’entrebâillement un homme avait passé la tête et l’avait retirée aussitôt.

— Voici mon homme, fit M. Lecoq, en appelant le garçon pour solder l’addition, sortons, il doit nous attendre dans le passage.

Dans la galerie, en effet, un jeune homme vêtu comme les ouvriers tapissiers attendait, tout en paraissant flâner le long des boutiques. Il avait de longs cheveux bruns et les moustaches et les sourcils du plus beau noir. Certes, le père Plantat ne reconnut pas le Pâlot. M. Lecoq qui a l’œil plus exercé, le reconnut bien, lui, et même il parut assez mécontent.

— Mauvais, grommela-t-il, lorsque l’ouvrier tapissier le salua, pitoyable. Crois-tu donc, mon garçon, qu’il suffise, pour se déguiser, de changer la couleur de sa barbe ? Regarde-toi un peu dans cette glace et dis-moi si l’expression de ta figure n’est pas absolument celle de tantôt ? Ton œil et ton sourire ne sont-ils pas les mêmes ? Puis, vois, ta casquette est bien trop de côté, ce n’est pas naturel, et ta main ne s’enfonce pas assez crânement dans ta poche.

— Je tâcherai, monsieur, de faire mieux une autre fois, répondit modestement le Pâlot.

— Je l’espère bien, mais enfin, pour ce soir, le concierge de tantôt ne te reconnaîtra pas, et c’est tout ce qu’il faut.

— Et maintenant que dois-je faire ?

— Voici tes instructions, dit Lecoq répondant au Pâlot, et surtout ne va pas te tromper. D’abord, tu vas retenir une voiture ayant un bon cheval. Tu iras ensuite chez le marchand de vins chercher un de nos hommes