Page:Gaboriau - Le Crime d’Orcival, 1867.djvu/410

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Il courut à la fenêtre, aperçut les hommes de M. Lecoq et revint hideux de terreur, à moitié fou.

— On peut toujours essayer, disait-il, ou se déguisant

— Insensé ! Il y a là, tenez, un agent de police, et c’est lui qui a laissé sur le coin de cette table ce mandat d’arrêt.

Il vit qu’il était perdu sans ressources.

— Faut-il donc mourir ! murmura-t-il.

— Oui, il le faut, mais, auparavant, écrivez une déclaration de vos crimes, on peut soupçonner des innocents…

Machinalement il s’assit, prit la plume que lui tendait Laurence, et écrivit :

« Près de paraître devant Dieu, je déclare que seul et sans complices j’ai empoisonné Sauvresy et tué la comtesse de Trémorel, ma femme. »

Quand il eut signé et daté, Laurence ouvrit un des tiroirs du bureau où se trouvaient des pistolets. Hector en saisit un, elle s’empara de l’autre.

Mais comme à l’hôtel autrefois, comme dans la chambre de Sauvresy mourant, Trémorel, au moment d’appuyer l’arme sur son front, sentit le cœur lui manquer. Il était livide, ses dents claquaient, il tremblait au point qu’il faillit laisser échapper le pistolet.

— Laurence, balbutia-t-il, ma bien-aimée, que vas-tu devenir ?…

— Moi ! j’ai juré que partout et toujours je vous suivrais. Comprenez-vous ?

— Ah ! c’est horrible, dit-il encore. Ce n’est pas moi qui ai empoisonné Sauvresy, c’est elle, il y a des preuves ; peut-être qu’avec un bon avocat…

M. Lecoq ne perdait ni un mot, ni un geste de cette scène poignante. Volontairement ou involontairement, qui sait ? il poussa la porte qui fit du bruit.

Laurence crut que cette porte s’ouvrait, que l’agent revenait, qu’Hector allait tomber vivant aux mains de la police…