Page:Gaboriau - Le Dossier n°113, 1867.djvu/161

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— J’ai déjà quelques petites notes, répondit M. Verduret, qui m’ont été fournies par votre père, lequel connaît bien la famille Clameran ; elles sont fort succinctes, mais j’en attends d’autres.

— Que vous a dit mon père ?

— Rien de favorable, rassurez-vous. Voici au surplus pour votre édification, le résumé de ses renseignements :

« Louis de Clameran est né au château de Clameran, près de Tarascon. Il avait un frère aîné nommé Gaston. En 1842, à la suite d’une rixe où il avait eu le malheur de tuer un homme et d’en blesser grièvement un autre, Gaston fut obligé de s’expatrier. C’était un garçon loyal, franc, honnête, que tout le monde aimait. Louis, au contraire, avait les plus détestables instincts et était haï.

« À la mort de son père, Louis vint à Paris, et, en moins de deux ans, dévora, non-seulement sa part de l’héritage paternel, mais aussi la part de son frère exilé.

« Ruiné, criblé de dettes, Louis de Clameran se fit soldat, et se conduisit si mal au régiment qu’il fut envoyé aux compagnies de discipline.

« À sa sortie du service, on le perd totalement de vue ; tout ce qu’on sait, c’est qu’il habita successivement l’Angleterre et l’Allemagne, où il eut une horrible affaire dans une ville de jeux.

« En 1865, nous le retrouvons à Paris. Il était dans la dernière des misères et fréquentait les pires sociétés, vivant uniquement dans le monde des escrocs et des filles.

« Il avait usé les plus honteux expédients lorsque, tout à coup, il apprit le retour de son frère en France. Gaston avait fait fortune au Mexique. Mais, jeune encore, habitué à une vie active, il venait d’acheter, près d’Oloron, une usine de fer, quand, il y a six mois, il est mort entre les bras de son frère Louis. Cette mort a donné à notre Clameran et une grande fortune et le titre de marquis. »

Prosper réfléchissait. Depuis vingt-quatre heures que