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parlé par ma bouche. J’ai flétri comme il convient ta coupable conduite. Pendant cette période, j’ai triomphé à tes dépens. Revenant sur ses impressions premières, Mme  Fauvel m’a aimé, estimé, béni.

— Ce temps est loin.

Louis ne daigna pas relever l’ironique interruption de son neveu.

— Nous arrivons, poursuivit-il, à la troisième phase, pendant laquelle Mme  Fauvel, ayant Madeleine pour la conseiller, nous a presque jugés à notre juste valeur. Oh ! ne t’y trompe pas, elle nous a redoutés et méprisés autant l’un que l’autre. Si elle ne s’est pas mise à te haïr de toutes ses forces, c’est que, vois-tu, Raoul, le cœur d’une mère, surtout dans la situation où se trouve madame Fauvel, a des trésors d’indulgence et de pardon à rendre le bon Dieu jaloux. Une mère seule peut, en même temps, mépriser, et adorer son fils.

— Elle me l’a, sinon dit, au moins fait comprendre, en termes tels que j’ai été ému… moi !

— Parbleu ! Et moi, donc ! Enfin, c’est là que nous en étions ; Mme  Fauvel tremblait, Madeleine se dévouant, avait congédié Prosper et consentait à m’épouser, quand l’existence de Gaston nous a été révélée. Depuis, qu’est-il advenu ? Tu as su, aux yeux de Mme  Fauvel, te faire plus blanc que les neiges immaculées, et tu m’as fait, moi, plus noir que l’enfer. Elle s’est reprise à admirer tes nobles qualités, et à ses yeux et aux yeux de Madeleine, c’est moi dont la pernicieuse influence te poussait vers le mal.

— Tu l’as dit, oncle vénéré, c’est là que nous en sommes.

— Eh bien ! nous abordons le cinquième acte ; par conséquent, un nouveau revirement est indispensable à notre pièce.

— Un nouveau revirement…

— Te paraît difficile, n’est-ce pas ? Rien de si simple. Écoute-moi bien, car de ton habileté dépend l’avenir.

Raoul, sur son fauteuil, prit la pose des auditeurs intrépides, et dit simplement :