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Page:Gaboriau - Le Dossier n°113, 1867.djvu/401

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vons rien pour lui, disait-elle à sa tante, il s’arrêtera et te reviendra.

Le jour vint, cependant, où Madeleine et sa tante se trouvèrent aussi dénuées de tout l’une que l’autre.

La veille, Mme Fauvel avait eu quelques personnes à dîner, et c’est à grand’peine qu’elle avait pu donner au cuisinier l’argent nécessaire à certains achats qu’il était allé faire à Paris.

Raoul se présenta ce jour-là. Jamais, à ce qu’il prétendit, il ne s’était trouvé dans un embarras si grand ; il lui fallait absolument deux mille francs.

On eut beau lui expliquer la situation, le conjurer d’attendre, il ne voulut rien entendre, il fut terrible, impitoyable.

— Mais je n’ai plus rien, malheureux, répétait madame Fauvel désespérée, plus rien au monde, tu m’as tout pris. Il ne me reste que mes bijoux, les veux-tu ? S’ils peuvent te servir, prends-les.

Si grande que fût l’impudence du jeune bandit, il ne put s’empêcher de rougir.

Il était pris de pitié pour cette femme infortunée, qui avait été si bonne, si indulgente pour lui, qui tant de fois lui avait prodigué ses maternelles caresses. Il plaignait cette malheureuse jeune fille, noble victime d’une situation qui n’était pas son œuvre.

Mais il avait promis, mais il savait qu’une main puissante arrêterait ces pauvres femmes au bord du précipice, mais il voyait la fortune, une grande fortune, au bout de toutes ces infamies, qu’il se promettait d’ailleurs de racheter plus tard.

Il se roidit donc contre son attendrissement, et c’est d’une voix brutale qu’il répondit à sa mère :

— Donne ; j’irai au Mont-de-Piété.

Mme Fauvel lui donna un écrin renfermant une parure de diamants. C’était le présent que lui avait fait son mari le jour où, examinant sa situation, il avait reconnu qu’il possédait plus d’un million.

Et, telle était l’atroce gêne de ces deux femmes qu’en-