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l’horreur de la conduite de Raoul, pour reconnaître dans ses horribles menaces un suprême expédient.

Oubliant le passé, sans souci de l’avenir, tout entière à la situation présente, elle ne voyait qu’une chose, c’est que son fils allait mourir, se tuer, et qu’elle ne pouvait rien pour l’arracher au suicide.

— Je veux que tu attendes, dit-elle, André va rentrer, je lui dirai que j’ai besoin de… Combien t’avait-on confié ?

— Trente mille francs.

— Tu les auras demain.

— C’est ce soir qu’il me les faut.

Elle se sentait devenir folle, elle se tordait les mains de désespoir.

— Ce soir, disait-elle, que n’es-tu venu plus tôt ? Manquais-tu donc de confiance en moi ?… Ce soir, il n’y a plus personne à la caisse… sans cela !…

Ce mot, Raoul l’attendait, il le saisit au passage ; il eut une exclamation de joie comme si une lueur eût éclairé les ténèbres d’un désespoir réel.

— La caisse ! s’écria-t-il, mais tu sais où est la clé ?

— Oui, elle est là.

— Eh bien !…

Il regardait Mme Fauvel avec une si infernale audace qu’elle baissa les yeux.

— Donne-la moi, mère, supplia-t-il.

— Malheureux !…

— C’est la vie que je te demande.

Cette prière la décida, elle prit un des flambeaux, passa rapidement dans sa chambre, ouvrit le secrétaire et y trouva la clé de M. Fauvel…

Mais, au moment de la remettre à Raoul, la raison lui revint.

— Non, balbutia-t-elle, non, ce n’est pas possible.

Il n’insista pas et même parut vouloir se retirer.

— En effet, dit-il… alors, mère, un dernier baiser.

Elle l’arrêta :

— Que feras-tu de la clé, Raoul ? as-tu le mot ?