résultat des interrogatoires de Prosper, ses dénégations obstinées, les charges qui s’élevaient contre lui, les hésitations du juge d’instruction, et enfin sa mise en liberté, faute de preuves suffisantes — ainsi que le spécifiait l’arrêt de non-lieu. Depuis la tentative de restitution de Clameran, Mme Fauvel ne doutait pas de la culpabilité du caissier.
Elle n’en disait mot ; mais intérieurement elle l’accusait d’avoir séduit, entraîné, poussé au crime Raoul, ce fils qu’elle ne pouvait prendre sur elle de cesser d’aimer.
Madeleine, bien au contraire, était sûre de l’innocence de Prosper.
Si sûre, qu’ayant su qu’il allait être libre, elle osa demander à son oncle, sous prétexte d’une bonne œuvre, une somme de dix mille francs qu’elle fit parvenir à ce malheureux, victime de fausses apparences, et qui, d’après tout ce qu’elle avait entendu dire, devait se trouver sans ressources.
Si dans la lettre qu’elle joignit à cet envoi, lettre découpée dans son paroissien, elle conseillait à Prosper de quitter la France, c’est qu’elle n’ignorait pas qu’en France l’existence lui deviendrait impossible.
De plus, Madeleine était alors persuadée qu’un jour ou l’autre il lui faudrait épouser Clameran, et elle préférait savoir loin, bien loin d’elle l’homme qu’autrefois elle avait distingué et choisi.
Et pourtant, au moment de cette générosité que désapprouvait Mme Fauvel, ces deux pauvres femmes se débattaient au milieu d’inextricables difficultés.
Les fournisseurs, dont Raoul avait dévoré l’argent, et qui, pendant longtemps, avaient fait crédit, insistaient pour qu’on acquittât leurs factures. Ils ne comprenaient pas, disaient-ils, qu’une maison comme la maison Fauvel les fit attendre pour des sommes qu’ils traitaient d’insignifiantes. On devait à l’un deux mille, à l’autre mille, à un troisième cinq cents francs seulement. Le boucher, l’épicier, le marchand de vins se présentaient à la fois,