Page:Gaboriau - Les Gens de bureau, Dentu, 1877.djvu/203

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— Moi, continua M. Brugnolles, je n’ai qu’une corde à mon arc ; mais c’est la corde infaillible. Je suis malade.

— Maladie incurable ! je m’en doutais depuis que je vous écoute, dit Caldas.

— Ne croyez pas que cela soit facile. Il ne s’agit pas de dire : « Je suis malade, je vais prendre un congé ; » il faut arriver à se faire dire : « Vous êtes malade, prenez donc un congé ! » Voilà pourquoi je me tue de travail ici. Chacun sait bien que ces excès de labeur ont délabré ma santé. Je dois dire du reste qu’en huit jours je mets mon service au courant pour deux mois. J’ai fini ma besogne aujourd’hui ; demain je commencerai à éprouver des vertiges. Après-demain mon chef me suppliera d’aller me soigner. Et c’est ainsi, mon cher, que, tout en passant pour un excellent employé, toujours porté au tableau d’avancement, j’ai trouvé le moyen de ne venir au ministère que quarante jours par an.

— Mais que faites-vous du reste de votre temps ? demanda Caldas.

— Moi, je suis voyageur de commerce.