Page:Gaboriau - Les Gens de bureau, Dentu, 1877.djvu/57

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

service de moins que M. Rafflard. C’est en 1838 qu’il fut nommé surnuméraire ; il a mis vingt-trois ans à devenir commis principal ; on n’avançait pas vite de son temps ; il croit qu’il sera sous-chef au moment de sa retraite ; mais il est le seul à le croire. Rafflard a son bâton de maréchal ; tout le monde sait qu’il n’ira pas plus loin. Et s’il ne va pas plus loin, c’est simplement parce qu’il n’a pas été plus vite.

Son peu de chance dans l’administration a aigri son humeur ; il avait le caractère difficile en entrant au ministère de l’Équilibre ; il est devenu tout à fait insupportable. C’est la faute d’une gastrite, produit de son ambition rentrée.

Profondément inintelligent, il rachète son incapacité par une gravité imperturbable. Il est fainéant, mais on ne l’a jamais vu inoccupé. C’est le paresseux le plus actif et la nullité la plus solennelle de l’Équilibre.

M. Rafflard sembla fort choqué de la conduite de ses collègues.

— C’est avec de pareils enfantillages, dit-il, que vous faites le plus grand tort à tout le bureau. Vous ne serez donc jamais sérieux ?

Les fonctions de commis principal, au ministère de l’Équilibre, ne comportent aucune prééminence sur les autres commis ou rédacteurs. Il est chargé seulement