Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/195

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Certes, sa satisfaction fut immense, mais son visage demeura impénétrable. Il importait de laisser le prévenu dans cette idée qu’il jouait la prévention.

— Vous comprenez, lui dit le juge d’un ton de bonhomie parfaite, combien il serait important de retrouver ces deux femmes. Si leur témoignage s’accordait avec vos allégations, votre position serait singulièrement améliorée.

— Oui, je comprends cela, mais comment mettre la main dessus ?…

— La police est là… ses agents sont au service des prévenus dès qu’il s’agit de les mettre à même d’établir leur innocence. Avez-vous fait quelques observations qui puissent préciser le signalement et faciliter les recherches ?

Lecoq, dont l’œil ne quittait pas le prévenu, crut surprendre un sourire montant à ses lèvres.

— Je n’ai rien remarqué, dit-il froidement.

Depuis un moment, M. Segmuller avait ouvert le tiroir de son bureau. Il en sortit la boucle d’oreille ramassée sur le théâtre du crime, et la présenta brusquement à l’homme, en disant :

— Ainsi, vous n’avez pas aperçu ceci aux oreilles d’une des femmes ?…

L’imperturbable insouciance du prévenu ne fut pas altérée.

Il prit la boucle d’oreille, l’examina attentivement, la fit miroiter au jour, admira ses feux, et dit :

— C’est une belle pierre, mais je ne l’avais pas remarquée.

— Cette pierre, insista le juge, est un diamant.