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Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/255

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ler songeait que le succès serait d’autant plus honorable que les difficultés auraient été plus grandes. Et il espérait vaincre, surtout ayant un auxiliaire comme Lecoq, ce débutant en qui il avait reconnu des facultés extraordinaires et le génie de son état.

Aussi, l’idée ne lui vint-elle pas, après une journée écrasante, de se soustraire à la tyrannie de ses préoccupations ni de remettre les soucis au lendemain.

Il se hâta de dîner, avalant la bouchée double, et, son café pris, il se remit à la besogne avec une nouvelle ardeur.

Il avait emporté l’interrogatoire du soi-disant artiste forain, et il l’étudiait à la façon de l’ingénieur qui rôde autour de la place qu’il assiège, pour en reconnaître les endroits faibles où doivent converger les efforts de l’attaque.

Toutes les réponses, il les analysait, il en pesait les expressions une à une. Il cherchait le joint où il pourrait glisser quelque victorieuse question qui, semblable à une mine, disloquerait le système de défense.

Une bonne partie de sa nuit fut employée à ce travail, ce qui ne l’empêcha pas d’être debout de meilleure heure qu’à l’ordinaire.

Dès huit heures, il était habillé et rasé, il avait arrangé ses papiers, pris son chocolat, et il se mettait en route.

Il oubliait que l’impatience qui le dévorait ne bouillonnait pas dans les veines des autres. Il s’en aperçut bientôt.

C’est à peine si le Palais de Justice s’éveillait lorsqu’il y arriva. Toutes les portes même n’étaient pas encore