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Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/318

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Quand le jour se leva, il constata que son prisonnier était éveillé et assis sur le pied de son lit. Bientôt il sauta à terre et arpenta sa cellule d’un pas saccadé. Il était fort agité, contre son ordinaire, il gesticulait et par intervalles laissait échapper quelques paroles, toujours les mêmes.

— Quelle croix, mon Dieu !… répétait-il, quelle croix !

— Bon ! pensait Lecoq, tu es inquiet, mon garçon, de ton billet quotidien que tu n’as pas reçu… Patience, patience. Il va t’en arriver un de ma façon…

Enfin, le jeune policier distingua au dehors le mouvement qui précède la distribution des victuailles. On allait, on venait, les sabots claquaient sur les dalles, les surveillants criaient…

Onze heures sonnèrent à la vieille horloge fêlée, le prévenu commença sa chanson :

Libre et conDiogène,
Libre et Sous ton manteau,
Libre et content…

Il n’acheva pas ce troisième vers ; le bruit léger de la boulette de mie de pain tombant sur la dalle l’avait arrêté court.

Lecoq, la tête dans son trou, retenait son souffle et regardait de toutes les forces de son âme.

Il ne perdit pas un mouvement de l’homme, pas un tressaillement, pas un battement de paupière.

Mai s’était mis à regarder en l’air, du côté de la fenêtre, d’abord, puis tout autour de lui, comme s’il