Aller au contenu

Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/57

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

naïf qui est allé consulter une somnambule pour un objet perdu, et qui attend l’oracle.

— Suivre les femmes, continuait le jeune policier, à quoi cela mènera-t-il ? Peut-être à une découverte importante, peut-être à rien !

De ce côté, c’est l’inconnu avec toutes ses déceptions, mais aussi avec toutes ses chances heureuses.

Il se leva, son parti était pris.

— Eh bien !… s’écria-t-il, je choisis l’inconnu ! Nous allons, père Absinthe, nous attacher aux pas des deux femmes, et tant qu’ils nous guideront, nous irons…

Enflammés d’une ardeur pareille, ils se mirent en marche. Au bout de la voie où ils s’engageaient, ils apercevaient, ainsi qu’un phare magique, l’un la gratification, l’autre la gloire du succès.

Ils allaient grand train. Au début ce n’était qu’un jeu de suivre ces traces si distinctes qui s’éloignaient dans la direction de la Seine.

Mais ils ne tardèrent pas à être forcés de ralentir leur allure.

Le désert finissait, ils arrivaient aux confins de la civilisation pour ainsi dire, et à chaque instant des empreintes étrangères se mêlaient aux empreintes des fugitives, se confondaient avec elles ; et parfois les effaçaient.

Puis, en beaucoup d’endroits, selon l’exposition ou la nature du sol, le dégel avait fait son œuvre, et il se rencontrait de grands espaces absolument débarrassés de neige.

La piste se trouvait alors interrompue, et ce n’était pas trop, pour la ressaisir, de toute la sagacité de Lecoq et de toute la bonne volonté de son vieux compagnon.