Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/71

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Aussitôt il examina successivement le dessus de toutes les tables renversées. Sur l’une d’elles, celle qui se trouvait entre la cheminée et la fenêtre, on distinguait les traces encore humides de cinq verres, du saladier et même de la cuiller.

Cette circonstance avait pour le jeune policier une énorme gravité.

Elle prouvait clairement que cinq personnes avaient vidé le saladier de compagnie. Mais quelles personnes ?…

— Oh !… fit Lecoq sur deux tons différents. Oh !… Ne serait-ce donc pas avec le meurtrier qu’étaient les deux femmes !…

Un moyen simple se présentait pour lever tous les doutes. C’était de voir si on ne découvrirait pas d’autres verres. On n’en découvrit qu’un, de la même forme que les autres, mais plus petit. On y avait bu de l’eau-de-vie.

Donc les femmes n’étaient pas avec le meurtrier, donc il ne s’était pas battu parce que les autres les avaient insultées, donc…

Du coup, toutes les suppositions de Lecoq s’en allaient à vau-l’eau. C’était un premier échec, il s’en désolait en silence, quand le père Absinthe, qui n’avait pas cessé de fureter, poussa un cri.

Le jeune policier se retourna, il vit que l’autre était tout pâle.

— Qu’y a-t-il ? demanda-t-il.

— Il y a que quelqu’un est venu en notre absence.

— Impossible !…

Ce n’était pas impossible, c’était vrai.