Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/72

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Lorsque Gévrol avait arraché le tablier de la veuve Chupin, il l’avait jeté sur les marches de l’escalier, aucun des agents n’y avait touché… Eh bien !… les poches de ce tablier étaient retournées, c’était une preuve cela, c’était l’évidence.

Le jeune policier était consterné, et la contraction de son visage disait l’effort de sa pensée.

— Qui peut être venu ?… murmurait-il. Des voleurs ?… C’est improbable…

Puis, après un long silence que le vieil agent se garda bien d’interrompre :

— Celui qui est venu, s’écria-t-il, qui a osé pénétrer dans cette salle gardée par les cadavres d’hommes assassinés… celui-là ne peut être que le complice… Mais ce n’est pas assez d’un soupçon, il me faut une certitude, il me la faut, je la veux !…

Ah !… ils la cherchèrent longtemps, et ce n’est qu’après plus d’une heure d’efforts, que, devant la porte enfoncée par Gévrol, ils démêlèrent dans la boue, entre tous les piétinements, une empreinte qui se rapportait exactement à celles de l’homme qui était venu épier dans le jardin. Ils comparèrent, ils reconnurent les mêmes dessins formés par les clous, sous la semelle.

— C’est donc lui ! dit le jeune policier. Il nous a guettés, il nous a vus nous éloigner et il est entré… Mais pourquoi ?… Quelle nécessité pressante, irrésistible, a pu le décider à braver un danger imminent ?…

Il saisit la main de son compagnon, et la serrant à la briser :

— Pourquoi ?… continua-t-il violemment. Ah !… je ne le devine que trop. Il avait été laissé ici, oublié,