Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/86

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

hommes, et dès qu’il se fut éloigné, Lecoq dut commencer la lecture de son rapport.

Il le débitait rapidement, évitant de mettre en relief les circonstances décisives, réservant pour l’instruction sa pensée intime, mais si forte était la logique de ses déductions, qu’à tout moment il était interrompu par les approbations du commissaire et les « très-bien ! » des médecins.

Seul, Gévrol qui représentait l’opposition, haussait les épaules à se démancher le cou, tout en verdissant de jalousie.

Le rapport terminé :

— Je crois, jeune homme, dit le commissaire à Lecoq, que seul en cette affaire vous avez vu juste… Je me suis trompé. Mais vos explications me font voir d’un tout autre œil l’attitude du meurtrier pendant que je l’interrogeais, il n’y a qu’un moment. C’est qu’il a refusé, oh !… obstinément, de me répondre… Il n’a même pas consenti à me dire son nom…

Il se tut un moment, rassemblant dans sa mémoire toutes les circonstances du passé, et d’un ton pensif il ajouta :

— Nous sommes, je le jurerais, en présence d’un de ces crimes mystérieux dont les mobiles échappent à la perspicacité humaine… d’une de ces ténébreuses affaires dont la justice n’a jamais le fin mot…

Lecoq dissimulait un fin sourire.

— Oh ! pensait-il, nous verrons bien !…