Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/113

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— Pourquoi, diable ! vous mêler de cette histoire ! disait le duc. Je n’eusse point voulu prendre sur moi l’odieux de cette proposition, mais puisqu’elle était lancée…

— J’ai tenu à empêcher une sottise inutile !

— Sottise… inutile !… Jarnibleu ! marquis, vous avez tôt fait de trancher. Pensez-vous que ce damné baron nous adore ?… Que répondriez-vous, si on vous disait qu’il trame quelque chose contre nous ?…

— Je hausserais les épaules.

— Oui-dà !… Eh bien !… marquis, faites-moi le plaisir d’interroger Chupin.

XV


Il n’y avait pas deux semaines que le duc de Sairmeuse était rentré en France, il n’avait pas encore eu le temps de secouer de ses souliers la poussière de l’exil, et déjà son imagination, troublée par la passion, lui montrait des ennemis partout.

Il n’était à Sairmeuse que depuis deux jours, et déjà il en était à accueillir sans discernement et de si bas qu’ils vinssent, les rapports envenimés qui caressaient ses rancunes.

Les soupçons qu’il eût voulu faire partager à Martial étaient cruellement et ridiculement injustes.

À l’heure même où il accusait le baron d’Escorval de « tramer quelque chose, » cet homme malheureux pleurait au chevet de son fils, qu’il croyait, qu’il voyait mourant…

Maurice était au moins en grand danger.

Son organisation nerveuse et impressionnable à l’excès, n’avait pu résister aux rudes assauts de la destinée,