Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/322

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du rocher, Mme d’Escorval et Marie-Anne, l’abbé Midon et Maurice, et aussi quatre officiers à la demi-solde ?…

C’était donc dix personnes en tout qui s’étaient enfuies.

Et il en était à se demander comment tant de gens avaient pu disparaître comme cela, tout à coup, sans laisser de traces, sans seulement avoir été aperçues…

— Ah ! il n’y a pas à dire, pensait Martial, cela dénote une habileté supérieure… je reconnais la main du prêtre…

L’habileté en effet était grande, car les recherches ordonnées par M. de Courtomieu et par M. de Sairmeuse se poursuivaient avec une fiévreuse activité.

Cette activité même désolait le duc et le marquis, mais qu’y pouvaient-ils ?…

Il leur arrivait, ce qui le plus souvent advient aux chefs qui se passionnent tout d’abord. Ils avaient imprudemment excité le zèle de leurs subalternes, et maintenant que ce zèle allait à l’encontre de leurs intérêts et de leurs désirs, ils ne pouvaient ni le modérer, ni même se dispenser de le louer.

Ils ne songeaient cependant pas sans terreur à ce qui se passerait si le baron d’Escorval et Bavois étaient repris.

Tairaient-ils la connivence qui leur avait valu la liberté ? Évidemment, non. Ils n’étaient certains que de la complicité de Martial, puisque Martial seul avait parlé au vieux caporal, mais c’était assez pour tout perdre.

Heureusement, les perquisitions les plus minutieuses restaient vaines.

Un seul témoin déclarait que, le matin de l’évasion, au petit jour, il avait rencontré, non loin de la citadelle, un groupe d’une dizaine de personnes, hommes et femmes, qui lui avaient paru porter un cadavre.

Rapproché des circonstances des cordes et du sang, ce témoignage faisait frémir Martial.

Il avait noté un autre indice encore, révélé par la suite de l’enquête.