Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/331

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freusement altérée, où est le marquis de Courtomieu ?…

Le duc et le marquis étaient près de Mme Blanche, dans un petit salon, au bout de la grande galerie.

Martial y courut, suivi par un tourbillon d’invités qui, pressentant quelque scène très-grave, tenaient à n’en pas perdre une syllabe.

Il alla droit à M. de Courtomieu, debout près de la cheminée, et lui tendant la lettre de Maurice :

— Lisez !… dit-il d’un ton terrible.

M. de Courtomieu obéit, et aussitôt il devint livide, le papier trembla dans sa main, ses yeux se voilèrent, et il fut obligé de s’appuyer au marbre pour ne pas tomber.

— Je ne comprends pas, bégayait-il, non, je ne vois pas…

Le duc de Sairmeuse et Mme Blanche s’avancèrent vivement.

— Qu’est-ce ?… demandèrent-ils ensemble, qu’arrive-t-il ?

D’un geste rapide, Martial arracha la lettre des mains du marquis de Courtomieu, et s’adressant à son père :

— Ecoutez ce qu’on m’écrit, fit-il.

Il y avait là trois cents personnes, et cependant le silence s’établit, si profond et si solennel, que la voix du jeune marquis de Sairmeuse s’entendit jusqu’à l’extrémité de la galerie pendant qu’il lisait :

« Monsieur le marquis,

En échange de dix lignes qui pouvaient vous perdre, vous nous aviez promis sur l’honneur de votre nom, la vie du baron d’Escorval.

Vous lui avez, en effet, porté des cordes pour qu’il puisse s’évader, mais d’avance, sans qu’il y parût rien, elles avaient été coupées, et mon père a été précipité du haut des roches de la citadelle.

Vous avez forfait à l’honneur, Monsieur, et souillé votre nom d’un opprobre ineffaçable… Tant qu’une »