Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/358

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vous donner un certificat, et vous serez unis si indissolublement, Mlle Lacheneur et vous, que jamais la cour de Rome ne vous accorderait le divorce…

Suspecter la vérité de ces affirmations était difficile, et cependant Maurice doutait encore.

— Ainsi, monsieur, fit-il, tout hésitant, je trouverais un prêtre qui consentirait…

Le médecin se taisait, on eût dit qu’il se reprochait de s’être tant avancé, et de s’occuper ainsi d’une affaire qui n’était pas sienne.

Puis, tout à coup, d’un ton brusque, il reprit :

— Écoutez-moi bien, monsieur d’Escorval. Je vais me retirer ; mais avant j’aurai soin de recommander à la malade beaucoup d’exercice… Je le lui ordonnerai devant vos hôtes. En conséquence, après-demain, mercredi, vous louerez des mules et vous partirez, Mlle Lacheneur, le vieux soldat et vous, comme pour vous promener… Vous pousserez jusqu’à Vigano, à trois lieues d’ici, c’est là que je demeure… Je vous conduirai à un prêtre qui est mon ami, et qui, sur ma recommandation, fera ce que vous lui demanderez… Réfléchissez. Dois-je vous attendre mercredi ?…

— Oh ! oui, monsieur, oui !… Et comment vous remercier ?…

— En ne me remerciant pas !… Allons, voici l’hôtelier, redevenez M. Dubois.

Maurice était ivre de joie. Il comprenait fort bien toute l’irrégularité d’un tel mariage, mais il était persuadé qu’il rassurerait la conscience troublée de Marie-Anne. Pauvre fille !… Le sentiment de sa faute la tuait.

Il ne lui parla de rien ; cependant redoutant un événement imprévu qui peut-être anéantirait ses projets.

— La bercer d’espérances qui ne se réaliseraient pas serait cruel, pensait-il.

Mais le vieux médecin ne s’était pas avancé à la légère, et tout devait se passer comme il l’avait promis.

Un prêtre de Vigano bénit le mariage de Maurice d’Escorval et de Marie-Anne Lacheneur, et après les