Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/570

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Pendant près d’une minute, Martial resta confondu… puis, tout à coup, se précipitant à une table, il se mit à écrire, sans s’apercevoir que le commissionnaire lisait par-dessus son épaule…

Monsieur,

Non pas après-demain, mais ce soir. Ma fortune et ma vie sont à vous. Je vous dois cela pour la générosité que vous avez eue de vous retirer quand, sous les haillons de Mai, vous avez reconnu voire ancien ennemi, maintenant votre dévoué

MARTIAL DE SAIRMEUSE.

Il plia cette lettre d’une main fiévreuse, et la remettant au commissionnaire avec un louis :

— Voici la réponse, dit-il, hâtez-vous…

Mais le commissionnaire ne bougea pas…

Il glissa la lettre dans sa poche ; puis, d’un geste violent, fit tomber sa barbe et ses cheveux rouges…

— Lecoq !… s’écria Martial, devenu plus pâle que la mort.

— Lecoq, en effet, monseigneur, répondit le jeune policier. Il me fallait une revanche, mon avenir en dépendait… j’ai osé imiter, oh ! bien mal, l’écriture de M. d’Escorval…

Et comme Martial se taisait :

— Je dois d’ailleurs dire à monsieur le duc, poursuivit-il, qu’en remettant à la justice l’aveu écrit de sa main, de sa présence à la Poivrière, je donnerai des preuves de sa complète innocence.

Et pour montrer qu’il n’ignorait rien, il ajouta :

Mme la duchesse étant morte, il ne saurait être question de ce qui a pu se passer à la Borderie.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Huit jours après, en effet, une ordonnance de non-lieu était rendue par M. Segmuller en faveur du duc de Sairmeuse…