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Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/84

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çant comme ce calme profond qui précède l’orage… Martial à la fin le rompit :

— Les indications des paysans ne brillent pas précisément par leur netteté, reprit-il d’un ton léger, voici plus d’une heure que je cherche la maison où s’est retiré M. Lacheneur…

— Ah !…

— Je lui suis envoyé par M. le duc de Sairmeuse, mon père.

D’après ce qu’il savait, Maurice crut deviner qu’il s’agissait de quelque réclamation de ces gens si étrangement rapaces.

— Je pensais, fit-il, que toutes relations entre M. Lacheneur et M. de Sairmeuse avaient été rompues hier soir chez M. l’abbé Midon…

Ceci fut dit du ton le plus provoquant, mais Martial ne sourcilla pas. Il venait de se jurer qu’il resterait calme quand même, et il était de force à se tenir parole.

— Si ces relations, ce qu’à Dieu ne plaise ! prononça-t-il, sont jamais rompues, croyez, monsieur d’Escorval, qu’il n’y aura pas de notre faute…

— Ce n’est pas ce qu’on prétend.

— Qui, on… ?

— Tout le pays.

— Ah !… Et que dit-il ?…

— La vérité… Il est de ces offenses qu’un homme d’honneur ne saurait oublier ni pardonner.

Le jeune marquis de Sairmeuse branla la tête d’un air grave.

— Vous êtes prompt à vous prononcer, monsieur, dit-il froidement. Permettez-moi d’espérer que M. Lacheneur sera moins sévère que vous, et que son ressentiment, — juste, j’en conviens — tombera devant… — il hésitait — devant des explications loyales.

Une pareille phrase dans la bouche de ce jeune homme si fier, était-ce possible !…

Martial profita de l’effet produit pour s’avancer vers