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de charge, guidés par Costal. Comme ils approchaient du petit fort qui abritait la garnison espagnole, un cri de détresse parvint à eux. Ils ne furent pas longtemps sans en connaître la cause. À travers une échappée d’arbres, la goélette se montra couronnée de monde, roulant et tanguant sous la lame à peu de distance des rochers, et ses matelots cherchaient en vain à la préserver d’un naufrage inévitable. Ses câbles étaient rompus et le vent d’orage la poussait sur un lit de rochers aigus.

« Sang du Christ ! moi qui comptais sur cette goëlette, s’écria Galeana ; nous n’en aurons que les débris. »

Ce désastre, bientôt connu dans le camp espagnol, y jeta la confusion ; Galeana l’augmenta encore par son terrible cri de guerre, qui fut suivi de hurlements forcenés poussés par ses soldats, dont l’obscurité cachait le petit nombre. Leur brusque attaque, leurs clameurs, jointes aux éclats du tonnerre et aux cris de détresse des matelots de la goëlette, portèrent l’effroi des Espagnols à son comble. Les assaillants enfoncèrent à coups de hache les portes du fort. Sans presque éprouver de résistance, et après un court combat corps à corps, une partie de la garnison s’enfuit et l’autre se rendit sans conditions.

À peine le dernier coup de fusil venait d’être tiré que la goëlette touchant violemment sur les rochers s’inclina comme un cheval éventré par un taureau, et ses flancs s’ouvrirent. Les vainqueurs n’eurent plus alors qu’à s’emparer des hommes de l’équipage de la Guadalupe (c’est ainsi que s’appelait la goëlette), à mesure qu’ils échappaient au naufrage.

Le soleil vint bientôt jeter quelques pâles rayons à travers, les nuages, gonflés qui semblaient flotter sur l’Océan ; mais l’orage ne s’apaisa pas tout à fait à la naissance du jour.