Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/227

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pitaine, et, presque en même temps, il vit avec une horreur profonde s’avancer vers lui, portés par les flots, les cadavres de ceux qu’il croyait voir encore au loin faire force de rames pour gagner le large.

Les deux rôdeurs nocturnes avaient perdu quelque temps à dépouiller les cadavres gisants sur la grève et dans le canot, et ils avaient à peine achevé leur besogne quand l’aspect du capitaine les avait frappés d’effroi.

Tous deux s’étaient couchés au fond de la barque, ignorant si le personnage qui s’avançait était accompagné. Quand ils eurent acquis la certitude qu’il était seul, ils reprirent alors tranquillement leurs avirons pour s’éloigner, non sans avoir éprouvé la tentation de revenir attaquer don Cornelio.

Les appréhensions manifestées par le mariscal étaient évidemment bien fondées, et cependant il fallait, faute de pouvoir faire autrement, prendre la résolution de regagner, en tournant le fort, le camp de Morelos en dépit des rôdeurs.

Le capitaine avait déjà fait ; l’avant-veille, un chemin à peu près semblable avec Costal, et, à tout prendre, il avait encore la chance de le rencontrer. Il s’orienta de son mieux pour se retracer la position du voladero de los Hornos, et, son sabre d’une main, un pistolet de l’autre, il s’engagea de nouveau et assez résolûment dans le chemin creux d’où il sortait.

« Pourquoi le nègre et l’Indien n’auraient-ils pas pris ce même parti ? » se demandait-il en marchant. Cette réflexion, dont il aurait dû être frappé d’abord, le rassura sur le compte de celui à qui il devait au moins deux fois la vie et dissipa une de ses plus tristes appréhensions ; alors il chemina plus gaiement, quoique à l’aventure.

La lune se leva claire et brillante, et, si sa clarté exposait le capitaine à être vu, elle lui laissait aussi la faculté d’apercevoir les ennemis et les pas dangereux de ces montagnes. Il arriva en effet sans accident au sommet