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Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/234

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puis cent jours par le colonel don Valerio Trujano avec trois cents soldats contre les quinze cents hommes d’une division espagnole commandée par le brigadier Bonavia, gouverneur de Oajaca, et les commandants Caldelas et Regules.

On a entendu le muletier Trujano entonner d’une voix ferme devant l’inondation, et quand il luttait contre sa violence, son De profundis et son In manus ; il avait sans doute imposé son esprit religieux aux assiégés : car, de temps à autre, du sein de la ville morne et désolée, le son grave d’un chant religieux proféré par trois cents bouches arrivait jusqu’au camp royaliste.

Dans un moment où les prêtres quittaient l’autel pour le champ de bataille, où rien dans leurs actions, dans leurs paroles, ne rappelait leur première profession, don Valerio Trujano reproduisait l’un des personnages les plus austères de nos guerres religieuses. Il ressemblait à ces héros ascétiques, grands diseurs de patenôtres, dont l’épée toujours levée frappait sans pitié, et qui marchaient au combat en récitant la Bible. Peut-être même ressemblait-il mieux à l’un des héroïques templiers, alors que, fidèles encore à leur humble règle sans se soucier d’un vain renom, ils s’agenouillaient, avant le combat, en face de l’ennemi, et chargeaient les Sarrasins en entonnant le célèbre psaume de l’ordre : Quare fremuerunt gentes, eux qui ne savaient frémir de rien.

Tel était, ce matin-là, le tableau que présentait la plaine de Huajapam : des champs dévastés, des ruines, des cadavres partout, et la bannière royaliste en face du drapeau de l’insurrection.

Maintenant, avant de pénétrer dans la ville assiégée, nous jetterons un coup d’œil dans l’intérieur du camp des assiégeants.

Au commencement de cette matinée, deux des cavaliers qui battaient la plaine amenèrent avec eux un