Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/26

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que de rares habitants goitreux, nous recommençâmes à gravir par d’horribles sentiers le second rempart de la Sierra-Madre, dont nous eûmes raison à son tour. La grande cordillère était franchie, et trois jours après nous étions à Tépic.

Cinq ou six mortels jours s’étaient écoulés depuis notre arrivée à cette dernière ville, et je devais y en passer encore au moins un nombre égal en attendant la venue de mes muletiers. Tout voyageur oisif qui s’est trouvé dans une ville où il n’y a pas de monuments publics, religieux ou profanes, à visiter, où l’on ne connaît personne, où il y a peu d’enseignes et pas la moindre affiche pour se distraire, pourra se faire une idée de la longueur des jours que je subissais. Mon compagnon de route était la plupart du temps en course pour ses affaires, et Dieu sait quelles affaires ! Il n’était pas facile de le deviner, mais je ne pouvais m’empêcher de croire que le digne capitaine faisait le commerce comme il avait fait la guerre, en partisan et un peu en dehors des voies légales ; après tout, que m’importait ? Toutefois, dans ses courses, il lui avait été impossible de mettre la main sur son ami don Cornelio Lantejas, que personne ne connaissait à Tépic, et j’aurais volontiers soupçonné que l’existence de cet homme était aussi problématique que les affaires du capitaine, si heureusement le hasard ne m’eût mis sur la trace du compagnon de Morelos.

« Don Ruperto se dérange, me dit, le matin du jour suivant, notre hôtesse doña Faustina d’un air évidemment contrarié ; il mangera ses galettes de maïs au piment (tortillas enchiladas) et ses haricots rouges glacés, et par conséquent détestables.

— En effet, répondis-je en m’asseyant seul à la table du déjeuner ; le capitaine est parti ce matin de si bonne heure que je ne l’ai pas entendu s’habiller ; mais, quant à son repas… »