Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/301

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nature, les divers hôtes des bois vont s’éveiller ou s’assoupir.

Quoique les ombres de la nuit commençassent déjà à disparaître, l’œil de l’homme, au milieu des vapeurs nuageuses qui s’élevaient du fleuve, n’aurait pu discerner encore de quelle espèce de végétation ses bords étaient couverts. Les panaches des palmiers, qui s’élançaient orgueilleusement au-dessus d’une immense masse de feuillage, seuls étaient distincts, comme jadis ceux des chevaliers dans la mêlée.

Les rives de l’Ostuta semblaient aussi complètement désertes qu’aux jours où les enfants de l’Europe n’avaient pas encore abordé aux rivages américains ; mais la vue perçante des oiseaux de nuit qui se balançaient au sommet des arbres pouvait saisir des objets invisibles au daim, au maïpouri, comme au héron et au flamant ; à travers les vapeurs nocturnes, des feux lointains et épars scintillaient le long de la rive droite du fleuve, comme de pâles étoiles dans un ciel brumeux.

Ces feux indiquaient des bivouacs et trahissaient seuls le voisinage de l’homme.

Sur la rive gauche, la solitude non plus n’existait pas, elle n’était qu’apparente : des feux y jetaient encore quelques lueurs. Assez loin d’eux, à travers la brume, entre le fleuve et la route qui conduisait de Huajapam à l’hacienda del Valle, on aurait pu voir d’abord, au milieu d’une petite clairière ; un groupe composé de huit cavaliers qui semblaient tenir conseil entre eux.

Plus rapprochés du fleuve à trois ou quatre portées de fusil environ de ce groupe deux hommes, à pied, remontaient avec précaution vers l’endroit où le chemin del Valle à Huajapam serpentait à travers des fourrés épais de gaïacs et de cèdres-acajou.

Enfin, entre ces huit cavaliers et ces deux piétons, et à pareille distance à peu près des uns et des autres, un homme seul, qu’on ne pouvait appeler ni piéton, ni ca-