Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/302

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valier, paraissait ne se préoccuper de rien. En effet, fortement attaché avec une ceinture de soie entre deux mères branches d’un énorme acajou, il dormait du plus profond sommeil à plus de dix pieds au-dessus du sol.

L’épais feuillage de l’arbre et l’obscurité de la nuit le dérobaient complétement à la vue de tout être humain. Un Indien eût passé sous l’acajou sans deviner sa présence, et, du haut des arbres voisins, l’œil d’un oiseau de nuit n’eût pu l’apercevoir davantage.

Pour ne pas anticiper sur notre récit, nous différerons de faire connaître au lecteur quels étaient les huit cavaliers et les deux piétons.

Quant au personnage tranquillement endormi dans son lit aérien, nous dirons tout d’abord que c’était don Rafael lui-même.

Il est des moments où la lassitude du corps l’emporte sur les appréhensions de l’esprit, et le colonel se trouvait précisément dans un de ces moments-là.

La fatigue de trois journées de marche, jointe à l’absence de tout sommeil pendant la nuit précédente, lui procuraient, en dépit des dangers de sa situation et de l’incommodité de sa posture, ce repos profond que goûte le soldat harassé, la veille d’une bataille sanglante.

Plus loin encore, mais dans une partie du bois voisine de la route de Oajaca qui aboutissait au gué dont nous ayons déjà parlé, à peu de distance de l’Ostuta et du lac mystérieux du même nom, formé des eaux du fleuve amenées par des conduits souterrains, des voyageurs paraissaient s’occuper, avec la précipitation de la frayeur, de reprendre avant le jour leur voyage interrompu.

Comme si la révélation soudaine de quelque grand péril venait de les frapper, deux d’entre eux éteignaient les restes d’un feu dont l’éclat aurait pu les trahir, deux