Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/332

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reprit-il, je ne puis le nier ; mais, à moins que ce ne soit un autre que vous, il y a dans le bois un royaliste qu’on va poursuivre à outrance.

— À mon tour je ne saurais nier que je sers la cause du roi, dit simplement don Rafael.

— Ces cris, dont je connais la signification, indiquent qu’on doit prendre mort ou vif un royaliste caché quelque part dans ces fourrés, continua le Zapote. Ceux qui vous poursuivent vous ont donc déjà vu ?

— J’ai tué hier soir deux des leurs à leur nez et à leur barbe.

— Alors je ne puis espérer vous faire passer, comme mon compère que voici, pour un prisonnier ordinaire, qui n’est ni royaliste ni insurgé.

— C’est douteux, du moins.

— C’est de toute impossibilité, et je ne puis vous promettre qu’une chose : non-seulement de ne pas vous trahir au cas où nous parviendrons, mon compère et moi, à nous tirer de ce pas épineux, mais d’essayer de dépister ceux qui vous cherchent ; car je commence à me lasser de ce métier de bandit… À une condition cependant.

— Laquelle ? demanda le colonel.

— C’est que vous nous permettiez de vous fausser compagnie. Je ne puis rien pour vous sauver, vous le voyez. Vous ne pourriez que nous perdre sans profit pour vous, ou nous empêcher de remettre à qui de droit le message dont nous sommes chargés. D’un autre côté, bien que ce ne soit que depuis un instant, votre sort est lié au nôtre, et vous abandonner au milieu du danger, sans votre consentement, serait une lâcheté dont j’aime autant recevoir de vous l’absolution. »

Il y avait dans les paroles du Zapote un accent de loyauté dont le colonel fut frappé malgré lui.

« Qu’à cela ne tienne, mon ami, dit résolûment don Rafael ; je vous permets d’aller chercher fortune où