Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/34

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deux ans ; son chapeau de feuilles de palmier ombrageait de ses larges bords une figure d’une expression douce et prévenante et d’une naïveté excessive, si deux yeux vifs et spirituels, brillant dans des orbites enfoncés, n’en eussent singulièrement relevé l’expression. Il était évident que cette bonhomie ne prenait sa source que dans la mansuétude du caractère et non pas dans un défaut d’intelligence. Une bouche fine, parfois railleuse et en accord parfait avec la vivacité du regard, indiquait que le jeune voyageur pouvait au besoin mettre une repartie caustique au service d’une grande finesse d’observation.

Pour le moment, l’expression dominante de sa physionomie était celle d’un désappointement complet mêlé d’une forte dose d’inquiétude.

Le paysage était de nature à justifier cette appréhension de la part d’un cavalier solitaire comme celui-ci.

Des plaines sans fin s’étendaient devant lui ; un terrain calcaire, hérissé d’aloès et de raquettes épineuses auxquels se mêlaient quelques herbes jaunies, présentait l’aspect le plus monotone et le plus triste. De distance en distance, de légers tourbillons d’une poussière blanchâtre s’élevaient et s’affaissaient tour à tour. Des cabanes disséminées de loin en loin étaient vides et abandonnées, et l’ardeur du soleil, le manque d’eau, la solitude profonde de ces steppes poudreuses, portaient le découragement et la peur dans l’âme du jeune cavalier.

Quoiqu’il éperonnât son cheval le plus consciencieusement qu’il lui fût possible, l’animal fatigué ne quittait son pas que pour prendre, pendant une minute ou deux seulement, un petit trot désagréable qui paraissait être sa plus fougueuse allure. Les efforts du cavalier n’aboutissaient qu’à couvrir son front d’une sueur d’épuisement et d’angoisse, qu’il était à chaque instant forcé d’éponger avec son mouchoir.

« Maudite bête ! » s’écriait-il parfois avec fureur. Mais