Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/369

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n’avait conservé que sa chemise et ses calzoneras assez maltraitées par leur brutalité. Bien que l’accent hypocrite de cet homme commençât à lui inspirer presque autant de terreur que l’aspect révoltant de l’autre chef, il sentit que le temps était trop précieux pour trembler plus longtemps sans s’expliquer.

« Seigneur capitaine ! » s’écria-t-il.

Mais le chef à figure de chacal l’interrompit :

« Appelez-moi seigneur colonel des colonels, c’est un titre auquel j’ai d’autant plus de droits, que, me l’étant conféré de mon autorité privée, personne n’a le pouvoir de me l’ôter.

— Seigneur colonel des colonels, si vos gens n’avaient eu le soin de me dépouiller d’un fort beau dolman brodé et d’un chapeau de vigogne à galons d’or, vous m’eussiez trouvé moins légèrement vêtu ; mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit ; j’ai d’autres griefs plus sérieux à exposer.

— Diable ! mon bon ami, un dolman brodé et un chapeau de vigogne à galons d’or, c’est important et cela doit se retrouver ; ce sont deux objets dont je manque précisément…

— J’ai à me plaindre d’une violence sans excuse. Je me nomme Lantejas, je sers la junte de Zittacuaro sous les ordres de l’illustre Morelos, et je suis capitaine, ainsi que le prouve ma commission… »

Une pensée subite et terrible interrompit don Cornelio. Il venait pour la première fois de se rappeler que sa commission, ses dépêches, ses lettres de créance, tout en un mot se trouvait dans la doublure de sa veste, si lestement enlevée.

« Vous vous nommez Lantejas, mon bon ami ! s’écria le colonel des colonels avec ravissement. C’est une bonne fortune… Le capitaine respira plus à l’aise… C’est une bonne fortune… pour nous, et vous allez vous en convaincre. »