Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/37

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les brodequins armés de longs éperons dont ses pieds étaient chaussés sous ses larges calzoneras de velours violet.

Une veste de batiste écrue appropriée à la chaleur du climat et un chapeau de laine de vigogne à galons d’or complétaient un costume moitié militaire moitié bourgeois.

« Avez-vous une longue traite à fournir sur ce cheval ? demanda-t-il en jetant un coup d’œil de côté sur la chétive monture du voyageur qu’il venait de joindre et en contenant l’ardeur de la sienne.

— Non, grâce à Dieu ! répondit celui-ci ; car, si je ne me trompe, je dois être à moins de six lieues de l’hacienda de San Salvador, qui est le but de mon voyage.

— N’est-elle pas voisine de celle de las Palmas ?

— Elle n’en est guère qu’à deux lieues.

— Alors nous suivons la même route, reprit le nouveau venu ; seulement je crains bien que nous ne la suivions à quelque distance l’un de l’autre, car votre cheval ne paraît pas pressé d’arriver, ajouta-t-il en souriant.

— C’est vrai, répondit le jeune homme en souriant aussi, et pendant le voyage j’ai plus d’une fois maudit l’économie avec laquelle monsieur mon père a jugé à propos de me pourvoir d’un cheval échappé aux cornes des taureaux du cirque de Valladolid, ce qui fait que le pauvre animal ne peut voir même une vache à l’horizon sans prendre aussitôt la fuite.

— Et vous venez de Valladolid sur cette triste bête ?

— En droite ligne, seigneur cavalier, mais en deux mois de route. »

En ce moment, le maigre cheval du jeune voyageur, animé par la présence d’un compagnon, sembla se piquer d’honneur et fit un effort qui, secondé par la complaisance du cavalier aux moustaches noires, lui permit de se maintenir à son niveau. Les deux voyageurs eu-