Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/372

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se soutenir. C’était un jeune homme de trente ans environ, dont une cruelle douleur défigurait le noble visage.

« Où sont tes trésors ? demanda la virago.

— Où est ta femme ? s’écria le mari.

À cette question, sa hideuse compagne lui lança un regard de haine auquel il répondit :

« La femme me vaudra de son père une riche rançon, et c’est pour cela que je la veux. »

Le jeune Espagnol indiqua d’une voix à peine articulée une chambre retirée de l’hacienda. Cette chambre avait échappé aux recherches des porteurs de torches qui exploraient la terrasse et les corridors. On cessa de s’occuper du capitaine pour courir à la chambre indiquée, et, quelques instants après, Bocardo fut de retour. Il annonça la trouvaille d’un baril de piastres ; mais la femme avait disparu.

À cette nouvelle, un éclair de joie profonde, quoique contenue, se laissa voir sur la figure crispée du pauvre jeune homme, à qui ses trésors semblaient peu importer, pourvu que sa femme échappât aux outrages des bandits. L’émotion qu’il venait d’éprouver le fit évanouir de nouveau. Quant à don Cornelio, il se rappela le blanc fantôme qu’il avait vu fuir à travers les arbres, et il ne douta pas que ce fût la proie qu’on cherchait en vain. Cependant, depuis quelques instants, il se sentait tout autre. Les vapeurs violentes de l’alcool qui remplissaient la salle, l’odeur âcre des torches de résine lui montaient-elles au cerveau, lui qui de sa vie n’avait jamais goûté de liqueurs fortes ? nous ne savons ; mais il se sentait animé d’une étincelle de ce feu que lui communiquaient les yeux de flammes de Galeana, quand il combattait à côté de lui sous l’égide de sa terrible lance.

« Seigneur Arroyo ! s’écria don Cornelio d’une voix dont le timbre l’étonna lui-même, et vous qui vous faites