Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/69

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pentaient d’arbre en arbre assuraient ses pas, comme les cordes qui servent de rampes dans certains escaliers ; d’autres, retombant de la cime des arbres, pendaient autour de lui, semblables aux cordages des mâts d’un navire ; il put enfin arriver au fond du ravin.

Là, nous l’avons dit, les eaux impétueuses de la cascade reprenaient leur cours tranquille et calme.

Quelque pressé que fût le dragon, la vue de cette magnifique cataracte, l’une des plus pittoresques et des plus imposantes qu’on puisse rencontrer en Amérique, lui arracha un cri de surprise et d’admiration.

Il s’assit sur l’un des fragments de roc autour desquels les eaux murmuraient gaiement, pour contempler un instant plus à l’aise la masse écumeuse qui se précipitait devant lui ; mais des nuées de maringouins altérés de sang ne tardèrent pas à troubler sa contemplation. L’officier allait fuir au plus vite pour éviter leurs cruelles piqûres, lorsqu’un spectacle imprévu captiva son attenlion et le fit rester à sa place.

Au milieu des flots de vapeur que lançait la cascade, la cime des deux ahuehuetes qui la couronnait n’apparaissait plus que vaguement, quand, sur le tronc incliné de l’un d’eux, il crut distinguer comme le masque de bronze florentin d’une figure indienne.

Cette apparition fut presque aussitôt suivie d’une seconde ; sur la fourche formée par deux des mères branches de l’autre cèdre, un deuxième visage se montra. Ce dernier était noir comme la nuit.

C’était, à n’en pas douter, un nègre et un Indien qui surgissaient tout à coup à ses yeux.

Par quel singulier hasard les trois principaux types de la race humaine se trouvaient-ils réunis dans ces lieux déserts ? Don Rafael y expliquait bien sa présence, mais nullement celle des deux autres.

Bientôt à la figure succéda le corps tout entier de l’Indien et celui du nègre.