Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/78

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vous y opposer ! s’écria vivement l’Indien, un instant ébranlé par les paroles du nègre.

— Nous avions usé notre dernier morceau d’amadou, nous ne pouvions donc plus rallumer notre feu.

— Nous aurions cherché à tâtons.

— Oui, répliqua le nègre avec ironie, c’était chose facile que de distinguer, dans l’obscurité de tous les diables qui règne au fond de cette cañada, un morceau d’or d’un caillou !

— Au poids, c’était aisé.

— Sans compter, reprit Clara en laissant voir cette fois le fond de sa pensée, qu’en cherchant nos morceaux d’or nous courions risque de nous rencontrer avec ces coquins de tigres cherchant de leur côté leurs morceaux de buffle, et enchantés de nous trouver à leur place.

— Qui se soucie des jaguars ? dit le tigrero avec dédain.

— Moi, parbleu ! répondit Clara.

— Celui qui ose affronter l’esprit des eaux s’inquiète-t-il de deux jaguars vagabonds ?

— Si l’on court risque de se faire étrangler, repartit le noir on a du moins la chance d’obtenir de lui la révélation d’un trésor, et c’est une compensation. Mais avec les tigres, il n’y en a aucune. Si donc je vous ai laissé partir, c’est que j’ai réfléchi que nous aurions le temps de revenir demain, au lever du soleil, reprendre nos recherches. »

L’Indien ne répondit rien et se remit en route. Le nègre, encore peu rassuré, le suivait toujours de près comme son ombre. Tout à coup il s’arrêta et s’écria en se frappant le front :

« Demain matin il ne sera plus temps ; et même, ajouta-t-il d’un air alarmé, nous ferions bien de quitter ces gorges au plus vite.

— Et pourquoi cela ? demanda vivement le noir, épou-