Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/137

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– L’Oiseau-Noir peut prendre ses ennemis tout vivants ; le désir d’un chef tel que lui est une loi pour ses guerriers.

— Bon, s’écria Main-Rouge, voilà qui est encore plus difficile que d’arracher la chevelure à trois cadavres. » Puis, jetant sur Baraja un regard qui le fit frémir : « Coquin, lui dit-il, est-ce pour cela que tu nous as conduits jusqu’ici ?

– N’ai-je pas dit à Votre Seigneurie, répondit Baraja, que le trésor était gardé par trois redoutables chasseurs ?

— Qu’importe ? dit Sang-Mêlé ; le Mexicain donnera son or, ou jusqu’au moindre lambeau de sa peau, s’il nous a trompés ; Main-Rouge et Sang-Mêlé donneront aux Indiens les trois blancs vivants, ou y perdront eux-mêmes la vie. Ils l’ont promis, et tous deux sont esclaves de leur parole. »

Le perfide métis avait prononcé ces mots moitié en espagnol, pour que Baraja l’entendît, et moitié en Indien, pour donner de sa fidélité à sa parole une idée que ses alliés ne partageaient pas ; et, s’adressant à l’Indien :

« Le nom de mon frère n’est-il pas le Chamois ?

Oui ; il bondit comme lui sur les rochers.

– Eh bien, le Chamois est-il résolu à sacrifier sa vie et celle de ses guerriers pour s’emparer des blancs ?

– Pourvu qu’il en reste trois pour conduire les prisonniers à la hutte de l’Oiseau-Noir, le Chamois consent à être du nombre de ceux qui ne reverront plus leur village.

– Bon, » dit le métis. Puis se tournant vers Baraja : Et vous, drôle, quel rôle jouerez-vous pour tenir votre promesse ? »

Baraja fut fort embarrassé de répondre. Il ne savait qu’une chose, c’est qu’en fait de rôle, il jouait celui du chacal qui, pour chasser, s’associe avec une bande de tigres.

Il fit cependant un effort sur lui-même, en se rappe-