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Les deux autres détonations presque instantanées annoncèrent les coups de Main-Rouge et de Sang-Mêlé. Le second cri de douleur était poussé par le Canadien. Deux balles avaient frappé à la fois le canon de son rifle, qui, violemment arraché de ses mains, roula près de l’Indien expirant.

Cœur-de-Roc eut encore la force de s’en saisir, et sa main défaillante le lança au pied des rochers, puis il ne bougea plus. Des hurlements de joie féroce accueillirent ce dernier exploit, tandis que le vieux chasseur, désarmé, jetait sur Pepe et sur Fabian un regard de mortelle angoisse.

Pendant ce temps, le ciel s’assombrissait toujours.



CHAPITRE XIII

LA SORTIE.


Au milieu des déserts du Far-West, dans les Prairies lointaines de l’occident de l’Amérique, trois choses sont de nécessité première : un cœur inaccessible à la crainte, en premier lieu ; puis, un habile et vigoureux coursier ; enfin, une carabine à toute épreuve.

Un courage indomptable comme celui des trois chasseurs rend souvent le cheval inutile ; mais, sans son fusil, l’homme au cœur fort n’est plus qu’un jouet fragile que se disputent la faim et les bêtes féroces, ou que le caprice d’un Indien vagabond peut briser.

À l’aspect de l’arme protectrice, qui dans les forêts du Canada jusqu’aux Montagnes-Brumeuses avait été la compagne fidèle de tant de dangers, et qui, échappée aujourd’hui aux mains entre lesquelles elle avait si souvent grondé, gisait abandonnée sur le sable, le cœur du