chargés de fleurs, promettaient une abondante récolte. Les travailleurs sortaient de leurs cabanes pour reprendre leur tâche de la veille ; mais, dans la cour de l’hacienda, des chevaux sellés et des mules chargées annonçaient les apprêts d’un voyage.
On n’a peut-être pas oublié la chasse aux chevaux sauvages dont le propriétaire de l’hacienda voulait offrir le divertissement à ses hôtes, et que ceux-ci, avons-nous dit, avaient acceptée avec empressement. Hélas ! le lendemain n’appartient pas à l’homme. Les événements si brusquement déroulés l’avaient assez prouvé. Mais don Augustin, plein de confiance dans la réussite des projets de don Estévan, et quoique affligé de son départ soudain, n’avait pas voulu renoncer, pour le sénateur, son gendre futur, ainsi que pour lui-même, aux plaisirs qu’il s’était promis. Tout était disposé, et il résolut que la chasse aurait lieu.
Les chevaux attendaient leurs cavaliers, celui de doña Rosarita comme les autres. Le sénateur, débarrassé de la présence d’un rival qu’il redoutait, et de celle de don Estévan, dont l’espèce de tutelle le gênait, était radieux ; il n’en était pas de même de la fille de l’hacendero.
Sa figure pâlie portait la trace de l’insomnie de la nuit. Elle affectait en vain une apparence de sérénité, que démentaient ses yeux encore humides et privés de l’éclat dont ils avaient brillé le jour précédent.
Au moment de monter à cheval, quand don Augustin donna le signal du départ, Rosarita se plaignit tout à coup d’une indisposition subite, dont sa pâleur ne justifiait que trop la réalité, et demanda à son père la permission de rester seule. Contrarié par ce nouvel obstacle, l’hacendero, tout en maugréant intérieurement et en pestant contre la santé délicate des femmes, n’en voulut pas moins partir pour la chasse en compagnie de Tragaduros, quand un incident vint redoubler sa mauvaise humeur.