Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/207

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Leur aspect était à la fois étrange et sinistre. L’un était un vieillard aux cheveux blancs, l’autre un jeune homme à la chevelure noire. Tous deux avaient leurs cheveux relevés en chignon derrière la tête et attachés avec des liens de cuir blanchâtre. Une espèce de calotte étroite de filet grossier, ornée d’une houppe de plumes, couvrait le sommet de leur tête et se maintenait par une mentonnière de cuir.

L’un et l’autre avaient les jambes nues ; mais le haut du corps était enveloppé d’une couverture de laine de l’apparence la plus commune.

C’était le costume des Indiens Papagos ; toutefois, au lieu d’être armés comme eux d’arcs et de flèches, les deux cavaliers portaient en travers de leur selle une longue et lourde carabine dont la crosse et le bois étaient constellés de clous de cuivre. La férocité empreinte en outre sur leur physionomie était loin de cet air de bonté débonnaire qui distingue cette tribu d’Indiens très-pacifiques, auxquels ils ne ressemblaient que par les vêtements.

Doña Rosario poussa son cheval contre celui de son père, tandis que le plus jeune des deux cavaliers arrêtait le sien pour jeter un regard de feu sur le visage de la jeune fille, dont la beauté parut vivement le frapper.

Les deux cavaliers échangèrent quelques mots dans une langue que les Mexicains ne comprirent pas, et passèrent outre, non sans que le plus jeune se retournât plusieurs fois pour suivre des yeux le voile flottant et la taille svelte de la fille de don Augustin. Puis tous deux disparurent dans l’ombre du soir.

« Je n’ai jamais vu, dit Rosarita avec un sentiment d’inquiétude, deux Papagos porteurs d’une semblable figure.

– Ni armés de cette manière, ajouta le sénateur ; on dirait deux loups revêtus de peaux de brebis.

– Bah ! répliqua don Augustin, il y a mauvaises de