Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/280

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levé le siége. Il sait que don Fabian connaît le gîte du trésor que j’avais si heureusement caché, et sa vie sera précieuse au bandit jusqu’à ce qu’il lui en ait révélé l’emplacement. »

Le raisonnement de Pepe était loin d’être dénué de vraisemblance, et le Canadien fut heureux de l’accepter comme infaillible. Cependant un indice alarmant vint tout à coup le détruire presque en entier.

Bois-Rosé s’était avancé vers le gouffre où s’engloutissait la cascade. Il cherchait inutilement sur les bords des traces humaines que la pluie avait effacées en fouettant le sol, quand un objet attira soudain ses regards. Il se baissa précipitamment et le montra d’un air sombre à l’Espagnol. C’était le couteau de Fabian. L’eau du ciel ne l’avait pas si bien lavé qu’il ne restât quelques traces de sang caillé aux clous de cuivre qui en ornaient le manche de corne. Comment le couteau de Fabian se trouvait-il si près de l’abîme ?

Pepe ne répondit pas à cette demande de son compagnon. La fertilité de son esprit fut un instant impuissante à trouver une explication naturelle, et les deux chasseurs restèrent sous le coup d’une effrayante incertitude.

Toutefois l’ex-miquelet ne se tint pas pour battu, et, s’avançant vers l’endroit où ils avaient reconnu tous deux, au froissement des buissons, la direction que les combattants avaient dû suivre en roulant du haut de la pyramide en bas, il traça en étendant la main une ligne imaginaire au centre de l’espace qui séparait les deux bouquets d’arbustes. Cette ligne aboutissait au pied de la colline tronquée, à peu de distance de l’ouverture du précipice.

« Le couteau de don Fabian aura échappé à ses mains dans la chute, et il aura roulé jusqu’à la place où vous l’avez trouvé. Supposez maintenant, ce qui est vraisemblable, que, dans la lutte qui se sera continuée au pied de la pyramide, deux ou trois de ces coquins soient ve-