Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/451

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

singuliers de ceux qui composent les escarmouches de broussailles dans les guerres indiennes.

Couchés à plat ventre derrière le tronc d’arbre, les deux chasseurs le poussaient devant eux à force de bras, puis s’arrêtaient derrière leur bouclier roulant, et surveillaient de l’œil et les progrès qu’ils avaient faits et les moindres mouvements de leurs ennemis.

« Main-Rouge, vieux coquin ! criait Pepe, incapable de contenir plus longtemps le torrent de malédictions qui débordait de sa poitrine à la vue de ses deux ennemis abhorrés, et toi, Sang-Mêlé, quel animal immonde voudra de vos corps infects, dont nous allons bientôt faire deux cadavres ? »

C’était un spectacle plein d’une singularité terrible que celui de ces deux hommes rampant sur le sol, roulant devant eux leur rempart mobile, s’arrêtant, essayant de mesurer, sans se découvrir, la distance qui les séparait encore de leurs ennemis. Assaillants et assiégés, les quatre combattants étaient, sans contredit, les plus braves, comme les meilleurs carabines des Prairies.

« Courage ! cria Wilson pour animer les efforts des deux chasseurs, vous touchez presque l’arbre de ces deux vermines. Si le crâne de l’un des deux dépasse le bois d’une seule ligne, j’en fais mon affaire. Jésus-Christ et le général Jackson ! je voudrais être à votre place. »

Les troncs d’arbres, en effet, étaient si près l’un de l’autre que les deux pirates, l’œil terrible, mais immobiles et silencieux, entendaient distinctement le souffle des assaillants, haletant sous les efforts qu’ils faisaient pour remuer leur pesant rempart. Sang-Mêlé poussa comme un rugissement de fureur.

« Tirez là-haut, Main-Rouge, dit-il en désignant de l’œil un arbre élevé où deux Comanches étaient grimpés, et d’où l’un d’eux s’apprêtait à faire feu sur le brigand.

– Eh ! le puis-je ? s’écria le vieux renégat avec une