Page:Gagnebin - Petite Nell, 1902.djvu/112

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— Je croyais que vous aimiez Hélène.

— L’aimer ! ses lèvres tremblèrent, ses yeux bleus si doux jetèrent un éclair d’indignation ; oh ! vous le savez, mais je ne peux pas, je ne peux pas rester.

— Pas même pour l’amour d’elle ?

Elle lui jeta un regard d’angoisse, ses petites mains se serrèrent convulsivement.

— Je ne peux pas.

Il pâlit, et la main qu’il appuyait au dossier de la chaise trembla ; il se pencha en avant, le regard toujours attaché sur cette pauvre figure en détresse, qui semblait implorer sa pitié.

— Et… Et pour l’amour de moi, Petite Nell, de moi qui vous aime tant ?

Était-ce vrai, avait-il dit cela ? ne savait-il pas qu’il n’était rien pour elle ?… Et pourtant, il attendait, toujours penché vers ce petit visage immobile, à deux pas de lui.

À la fin, les lèvres de Petite Nell s’agitèrent, ses mains se réunirent.

— Est-ce vrai ? fit-elle comme en un rêve.

— Si c’est vrai !

Il n’ajouta rien, il la tenait sur son cœur, elle s’y reposait, comme se reposent ceux qui se sont crus sans refuge.

— Ne le saviez-vous pas, que je vous aimais ? murmurait-il ; je ne peux pas vous dire combien, ni depuis quand, je sais seulement que c’est vrai.

Elle le laissait dire, et, bercée par le murmure de sa voix, elle oubliait de répondre et restait toute tranquille, comme un pauvre oisillon fatigué qui a enfin trouvé son nid.