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— Je ne vous dérangerai que quelques minutes.

Elle s’était levée et, d’étonnement, oublia d’offrir un siège à son visiteur, qui resta debout, appuyé au dossier de la chaise qu’elle venait d’occuper.

Oh ! les méchantes langues, comme elles font mal, comme elles déchirent le cœur en vous ouvrant les yeux, ces beaux yeux que Petite Nell n’osait plus lever, dans la crainte qu’il y lût ce qu’elle voulait garder pour elle toute seule.

— Je suis sûr, fit-il, péniblement surpris de son embarras, que vous savez déjà ce que je viens vous demander.

Elle secoua la tête.

— Hélène vient de m’apprendre votre départ, elle en est très chagrinée, si chagrinée que je suis venu…

— Oh ! je vous en prie, interrompit-elle, ne me demandez pas de rester, je vous assure que c’est impossible. Je vous en prie, ne soyez pas fâché, ajouta-t-elle, en voyant le pli de son front se creuser démesurément, je vous assure que je voudrais, mais je ne peux pas.

Il y eut un silence.

— Je ne suis pas fâché, dit-il tristement, mais inquiet d’Hélène, à qui votre départ va faire beaucoup de chagrin. Ne pourriez-vous pas, du moins, attendre encore un peu, jusqu’à ce qu’elle soit habituée à cette idée ?

— Non, non, c’est impossible ; si je retardais, cette place serait perdue pour moi, vous comprenez.

— Vous en trouverez une autre, peut-être meilleure.

Elle secoua la tête.