Page:Gagnebin - Petite Nell, 1902.djvu/33

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voyait rien, rien que cet être invisible avec lequel elle ne cessait de s’entretenir.

D’autrefois, elle lui parlait tout bas, sur un ton de joyeux mystère ; puis, elle se mettait à rire à la pensée d’aller bientôt vivre dans un pays ensoleillé. Et puis, la scène changeait, le lit était vide, la tête chérie ne reposait plus sur l’oreiller, elle était partie, et Petite Nell la suppliait, la conjurait de revenir.

Et, dans son ardeur, elle se serait jetée hors du lit, si une main ne l’eût retenue. Mais la petite malade, toujours inconsciente, ne sentait pas la douce pression de cette main ni le regard plein de tendresse qu’on attachait sur elle, ni les larmes toutes chaudes qui tombaient parfois sur sa pauvre figure.

Assise près du lit, dans le fauteuil de Maxime, la garde-malade poursuivait sa veille, le regard fixé sur la petite figure blanche qui se détachait à peine de l’oreiller.

Depuis quelques instants, Petite Nell semblait moins agitée, ses lèvres avaient peu à peu cessé de remuer, son souffle devenait plus lent, plus égal, par moments même elle paraissait dormir. Était-ce la fin, était-ce le commencement ? personne n’aurait su le dire.

La nuit passa, l’aube paraissait déjà, remplissant la chambrette d’une teinte grise et confuse, quand Petite Nell ouvrit les yeux.

Elle avait dormi, pour la première fois, mais… que s’était-il donc passé ? Elle pouvait respirer sans peine, sans douleur, et pourtant… elle était couchée, oui, tout étendue dans son grand lit, mais, comme elle avait rêvé ! elle en était encore fatiguée.